Réforme du code de justice des mineurs : stop à la communication politique !
L’Assemblée nationale examinera, mercredi 12 février, une proposition de loi du groupe Renaissance prétendument destinée à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs. Depuis plusieurs mois, je me suis opposé à ce texte qui s’affranchit du travail que nous avons conduit depuis maintenant cinq ans pour rénover la justice des mineurs et la doter de moyens suffisants pour traiter les dossiers transmis aux juges.C’est ainsi qu’en 2019 puis en 2023, nous avons mené des travaux d’évaluation destinés à préfigurer puis à évaluer le code de justice pénale des mineurs.
Il s’agissait de revoir un texte qui n’avait que peu évolué depuis l’ordonnance de 1945, tout en protégeant les grands principes de la justice des mineurs : la spécialisation des juridictions et des procédures, le principe de l’atténuation des peines et la primauté de l’éducatif sur le répressif.Avec succès, nous sommes parvenus à créer une procédure spéciale dite de « césure » du procès, au cours de laquelle le prévenu mineur est d’abord jugé, dans un bref délai de 10 jours à 3 mois, sur sa culpabilité avant d’être de nouveau présenté au juge pour enfant après une période de mise à l’essai, afin qu’une peine soit prononcée.
Durant ces six mois, le mineur est mis à l’épreuve, pris en charge par les services de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, et la sanction est adaptée à son comportement durant cette période. Pour les cas les plus graves, nous avions aussi prévu une procédure d’audience unique, au cours de laquelle le tribunal juge à la fois la culpabilité et la sanction. Le mineur peut être détenu un mois avant sa comparution en audience unique, ce qui reste, fort heureusement, l’exception.Toutefois, contrairement à toutes les recommandations faites par les députés ayant évalué ce texte et à celles de tous les professionnels du droit, le groupe Renaissance a notamment proposé de fixer de nouvelles peines à l’encontre des parents d’enfants jugés coupables, de créer une procédure de comparution immédiate et d’inverser, dans certains cas, « l’excuse de minorité », mécanisme d’atténuation des peines.Rien ne justifie ces mesures, sinon la communication politique.
Éric Dupond-Moretti, comme moi, avait exprimé son hostilité au texte de Gabriel Attal.En effet, on sait depuis 2007 et le quinquennat de Nicolas Sarkozy que les sanctions à l’encontre des parents sont inefficaces : ceux-ci sont, la plupart du temps, dépassés et, plus régulièrement encore, isolés face aux difficultés que peut leur causer un seul enfant d’une fratrie.De surcroît, la procédure de comparution immédiate introduirait dans le code de justice des mineurs une procédure réservée aux majeurs, enfreignant ainsi les principes fondamentaux de la justice des mineurs, sans avoir le moindre effet positif : exclusion des mesures éducatives, détention préalable dans les conditions du droit commun, procédure judiciaire expéditive… Cette mesure entraînerait également une surcharge d’activité pour les tribunaux correctionnels, qui n’en ont pas besoin.Enfin, autre mesure de désorganisation judiciaire, le texte proposait la suppression de l’excuse de minorité pour certains délits.
Aujourd’hui, les juges pour enfants s’affranchissent de l’atténuation des peines dans 0,5 % des cas et doivent le faire par une décision motivée. En cas d’adoption du texte, il faudrait, à l’inverse, justifier systématiquement l’application de l’atténuation des peines. Autrement dit, cela engendrerait une multiplication des procédures et une charge de travail accrue pour les magistrats, sans aucun bénéfice, menant ainsi à une embolie des tribunaux.
En commission, nous sommes parvenus à réécrire totalement la copie initiale et même à proposer de belles avancées, telles que l’obligation de proposer une mesure de justice restaurative (réparation matérielle du dommage causé), la limitation des cas de recours à l’audience unique et un meilleur encadrement de l’incarcération du mineur.
Le 12 février, il faudra faire preuve de la plus grande vigilance pour que le texte de loi ne donne pas, une fois encore, la part belle à la démagogie judiciaire

Non à la remise en cause du droit du sol à Mayotte !

Mon intervention en réponse au discours de politique générale
