Retrouvez-ici mon intervention relative au projet de loi finances, à La Tribune de l'Assemblée nationale :
"Monsieur le Président, Messieurs les ministres, Chers collègues, Ces prochains jours, l’Assemblée nationale va beaucoup parler. Mais va-t-elle être entendue ? Ces députés, issus d’une participation record aux élections seront-ils écoutés par ceux qui ont été nommés ?
Parce qu’à peine a-t-on entamé le débat que l’on évoque l’hypothèse de le clore. Par empressement (avec la procédure de l’article 49 alinéa 3) ou par procrastination (grâce aux dispositions de l’article 47), la Constitution vous laisse l’embarras du choix. S’il est pourtant un rôle qui est celui du Parlement, c’est celui de décider de la levée de l’impôt. Et sans trop qu’il soit besoin d’enquêter, vos prédécesseurs ont déjà avoué que nous traversions une crise de recettes. Parce que des baisses d’impôts parfois nécessaires n’ont pas été compensées. Parce que l’activité de certains secteurs comme le logement s’est effondrée (et avec elle la TVA qu’elle génère). Parce que certaines aides publiques ont été – comme nous l’avions craints – mal calibrées.
Je ne suis pas là pour faire de procès. Je ne suis pas procureur. Je ne vous ferai donc pas le procès de la première partie de votre budget qui n’était pas la moins présentable de vos copies budgétaires. Celles concernant les dépenses en revanche est tout bonnement inacceptable. Quant au projet de loi de financement de la sécurité sociale, il est indigeste. Tout juste consacre-t-il enfin la suppression des exonérations des cotisations que je défends depuis 5 ans. Et encore, il faudrait aller plus loin.
En préambule de son examen, je veux partager avec vous quelques principes qui guident l’action du courant politique dont je me revendique : la social-démocratie. Ce sont d’ailleurs le sens des amendements proposés par ma collègue Stella Dupont. Je veux d’abord vous dire que la justice fiscale ne peut être ni partielle, ni temporaire.
Certes, votre projet de loi de finances comporte des mesures intéressantes comme la contribution différentielle sur les plus hauts revenus ou le prélèvement sur les bénéfices des plus grandes entreprises.
C’est un bon début mais la justice fiscale doit être pérenne notamment pour mieux taxer les revenus d’une partie des foyers les plus fortunés qui échappent à l’impôt grâce à la capitalisation de leurs dividendes. Ces dividendes peuvent même être transmis à leurs héritiers sans fiscalité. L’urgence est de revoir la fiscalité des plus-values latentes sur les dividendes. Ils ne seront juste que s’ils embrassent plus largement.
C’est pourquoi nous voudrons amplifier l’effort sur ceux qui en ont les moyens. C’est pour cela que nous proposerons :
De réduire le seuil de revenu imposable à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à 120 000 € pour une personne seule et 240 000 € pour un couple (au lieu de 250 000 € et 500 000 €), d'’augmenter de 3 points le prélèvement forfaitaire unique (PFU), recettes entre 1 et 1,5 Md € (1% des foyers fiscaux concentrent 96% des montants totaux de dividendes). De majorer de 0,2 le taux de la taxe des transactions financières afin qu’elle finance toujours l’aide publique au développement, et que nous transférer son recouvrement à la DGFiPT. Nous pensons d’ailleurs que de nouvelles recettes pourront financer des nouvelles dépenses que nous proposons comme - le dégrèvement les maisons d'assistants maternels (MAM) de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. La transformation de la réduction d’impôt pour les frais de dépendance et d’hébergement des personnes dépendantes accueillies en établissement spécialisé en un crédit d’impôt.
Je veux ensuite affirmer que les aides publiques doivent être efficaces. Et lorsqu’elles ne le sont pas, elles sont des niches qui doivent être supprimées. C’est le cas du crédit impôt recherche (1ere dépense fiscale 8Md€/an) pour lequel il nous apparaît fondamental et a minima.
D’exclure les entreprises du secteur financier, de recentrer l’assiette (rapport IGF), - Et de plafonner son octroi à 100 millions d’euros par groupe de sociétés.
Nous proposons également de réduire de 5 points le taux du crédit d'impôt emploi d’un salarié à domicile tout en préservant les activités liées à l'assistance aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la garde d’enfants. Des aides publiques efficaces donc et qui doivent contribuer au modèle de société que nous voulons créer.
Dans ces circonstances, parce que nous souhaitons une société qui atteigne l’objectif de neutralité carbone, nous nous opposerons à l’augmentation de la taxe sur l’électricité. Comment comprendre et faire comprendre que l’électricité, c’est l’avenir, pourquoi adopter un mix énergétique 100% électrique mêlant astucieusement nucléaire et énergies renouvelables si c’est pour renchérir le prix pour tous et surtout pour les plus modestes ?
Comment faire adhérer nos concitoyens à la transition écologique en les assommant avec une hausse de TVA sur les chaudières à gaz ?
Enfin, les efforts demandés ne peuvent pas demander aux plus modestes ou aux services publics a fortiori lorsqu’ils viennent de faire l’objet d’une loi de programmation largement adoptée par le Parlement.
S’agissant des plus modestes et nous en parlerons pour le PLFSS, il sera inacceptable de traiter indistinctement tous les retraités en reportant pour tous au 1er juillet l’indexation des pensions. Ces quelques euros sont pour nombre d’entre eux essentiels.
Il ne sera pas plus acceptable de supprimer 4000 postes de professeurs, ce qui revient au bas mot pour un département comme le mien à fermer plus de 70 classes !
Et derrière les 500 millions d’euros dont vous prévoyez de priver le Ministère de la Justice, c’est 1300 emplois qui manqueront l’année prochaine à l’exécution de la loi de programmation.
Qui l’accepterait ? Qui ira le défendre dans les tribunaux ou les prisons ?
Quant aux collectivités, nous estimons comme tous les collègues que l’effort demandé est trop élevé et nous proposerons d’annuler la baisse de 2 points du FCTVA et de maintenir la dynamique de TVA transférée.
Messieurs les ministres, en social-démocrate que je suis, voici ce que je vous demande aujourd’hui :
De la justice fiscale ou pas de vote, Des aides publiques efficaces ou pas d’aide aux dépensiers publics, Du soutien pour nos services publics ou pas de soutien pour le gouvernement, un budget pour l’avenir ou pas d’avenir pour ce budget,
Et si finalement ce projet de loi de finances n’était pas si compliqué à faire adopter ?"